Des singes génétiquement modifiés

L'Homme est un être doué d'intelligence. Il possède la faculté de comprendre, d'apprendre et de s'adapter en fonction de son expérience. En ce sens l'intelligence humaine est actuellement la plus grande évolution qu'est connue l'humanité!

Tout a commencé il y a de cela des millions d'années. L'Homme préhistorique a appris à chasser, à construire des bâtiments, bâtissant ainsi la base de notre civilisation moderne. C'est ce qui l'a rapidement différencié des autres animaux et notamment de ses cousins les singes. Ces derniers, eux sont restés perchés sur les branches d'un arbre admiratif de ce que l'être humain bâtissait.

Les primates et les Hommes sont des parents proches. Génétiquement notre plus proche cousin est le chimpanzé. Toutefois sur le plan intellectuel la race humaine a pris les devants et a largement distancé les singes. Le cerveau humain a évolué, là où celui des primates est resté le même. Mais imaginons que ces animaux subissent la même évolution, que se passerait-il? Des chercheurs chinois se sont penchés sur la question.

Quand le Singe reçoit des gènes de cerveau Humain

Des scientifiques chinois ont pris le pari de réduire l'écart intellectuel existant entre les deux espèces. Ils ont créés des macaques rhésus en modifiant leur patrimoine génétique en leur ajoutant un gène humain. Ce génome serait à l'origine du développement de l'intelligence humaine et permettrait donc en théorie de rétablir la différence cognitive existante. Ces expériences sont décrites dans le journal National Science Review.

Le généticien Bing Su, travaillant à l'Institut de zoologie de Kunming, indique qu'il s'agit avant tout de comprendre l'évolution humaine. L'utilisation d'un modèle de primate transgénique (à qui on aurait implanté un gène) ne serait finalement qu'un moyen de compréhension. Pour exemple effectuer l'observation du développement d'un embryon humain serait plus difficile.

D'après les résultats de l'expérience, les macaques modifiés obtiennent un meilleur taux de réussite à un test de mémoire. De plus, leur cerveau se serait également développé, sans pour autant faire apparaître une évolution au niveau de la taille.Toutefois les expériences ne permettent pas de mettre en lumière les secrets du cerveau humain. Ni même de parler d'une évolution cognitive significative chez les primates après expérience.

À la suite de ces manipulations génétiques, la communauté scientifique occidentale a discuté de ces expériences et a jugé qu'elles étaient dangereuses. Éthiquement, effectués des tests sur des animaux génétiquement modifiés n'est pas juste.

James Sikela, généticien à l'université du Colorado atteste que : « L'utilisation de primates transgéniques afin d'observer des gènes humains liés à l'évolution du cerveau humain présente de nombreux risques difficiles à tracer. » Selon lui, ce type d'expérience peut être sans limite. C'est également un mépris des animaux sur lesquels les expériences sont appliquées. Une « simple modification » des gènes pourrait rapidement et au nom de la science se transformer en des modifications génétiques beaucoup plus importantes.

Expériences sur les singes: La Chine en avance 

En Europe ainsi qu'aux Etats-Unis, les expériences et la recherche sur les singes sont très limitées, ce qui n'est pas le cas en Chine. Le pays a à sa disposition des élevages de singes mais a également accès à une biotechnologie de pointe avec un matériel génétique avancé. C'est pourquoi ce pays domine dans le domaine de la manipulation génétique. Il a été le premier pays à créer des primates modifiés avec un outil d'édition génétique CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats). Grossièrement cet outil s'apparente à des ciseaux génétiques. Avec ces derniers il est possible de couper, prélever et remplacer des gènes.

Pour application, la Chine a annoncé en janvier 2019 qu'elle avait été capable de créer 6 clones d'un singe. Toutefois le procédé n'est pas parfait puisque ceux-ci souffraient de forts troubles mentaux.

Histoire de l'évolution de l'homme

Bing Su, le généticien de l’institut de Kunming est spécialiste dans la reconnaissance des signes de ce qu'on appelle la « sélection naturelle». C'est-à-dire les gènes qui ont permis à une espèce particulière de survivre face à un environnement donné. Par exemple, les Yaks ont du évoluer afin de survivre à la haute altitude et au froid de l’Himalaya.

L'intérêt de Bing se porte sur un mystère encore non-élucidé; celui de l'intelligence humaine. Le cerveau de l'Homme a connu une évolution certaine. Notre cerveau actuelle est plus grand et plus puissant que celui de nos ancêtres. Les scientifiques se sont intéressés à ce phénomène et ont recherché le gène qui a permis cette modification.

Afin de trouver la pièce unique du puzzle de l'évolution ils ont comparé l'ADN de l'Homme à celui du chimpanzé, qui lui est égal à 98%. En comparant les deux ADN, le but était de déterminer ce qui nous rendait unique, en tant qu'être humain.

Le gène du développement cérébral ?

Nous en parlions dans un article précédent, le gène FOXP2 a été identifié comme étant responsable de notre capacité à pouvoir parler. On l'appelle le gène du langage. À sa découverte, de nombreux scientifiques ont utilisés ce gène afin de le transmuter à des souris. Mais Bing Su, lui était intéressé par un autre gène ; le MCPH1 dit microcéphaline. La séquence du gène était différente chez l'Homme et le singe. Ce gène permettrait de faire un lien avec la taille du cerveau.

En 2010, la Chine a investi dans d'importants élevages de primates. Ces investissements ont été couplé à des laboratoires possédants des outils génétiques. Le but étant de faire progresser la science. Cette année là, Bing Su pu réaliser une expérience prometteuse : implanter un gène MCPH1 humain à un singe. Su et ses partenaires du laboratoire de recherche sur les primates ont élevé des embryons de macaques en présence d'un virus possédant le gène MCPH1 humain. Des 11 singes qui sont nés, seulement 5 ont survécus. Chaque singe possèdent entre deux à neuf fois le gène humain dans son organisme génétiquement modifié.

Expérience sur les singes : la bioéthique en question

Face à ces expériences, des questions sur les droits des animaux sont soulevés. James Sikela, généticien du Colorado rédige, avec l'aide de trois collaborateurs, un article sur « l'Éthique de l'utilisation de primates non humains transgéniques afin d'étudier ce qui nous rend humains ». Ils statuent sur le fait qu'il ne faut pas ajouter de gènes humains à un singe car celui-ci ressemble trop à l'homme.

Jacqueline Glover, bio-éthicienne autrice partenaire explique qu'humaniser un singe c'est également lui faire du mal. Si un singe était amené à comprendre ce qui lui arrivait, que ferait-il ? Où vivrait-il ? Pourquoi créer un être vivant qui ne saurait trouver sa place dans un monde qui ne lui était pas destiné.

Face à ces questionnements Bing Su a répondu au travers d'un mail explicatif. Il est comprend et est d'accord sur le point que malgré un lien de parenté fort avec l'Homme, le cerveau d'un singe ne devrait pas être modifié. Toutefois, la dernière fois qu'un singe et un être humain ont eus un ancêtre en commun remonte à plus de 24 millions d'années. Su tient à calmer les inquiétudes et questionnements éthiques : " Même si leur génome est proche du nôtre, il existe plusieurs millions de différences entre l'homme et le singe. Même en introduisant que quelques gènes humains, il est impossible qu'un singe devienne autre chose qu'un singe. Ce n'est pas de la science-fiction."

Un singe humain ? 

Au début des expériences, les chercheurs chinois avait de grandes attentes. Ils s'attendaient à ce qu'un primate transgénique devienne plus intelligent et notamment que son cerveau grossisse de manière remarquable. Les créatures servant à l'expérience ont été analysées à l'aide d'IRM ( Imagerie par Résonance Magnétique) afin de mesurer leur matière grise. Ils ont également subit de nombreux tests de mémoire. D'après les résultats, les singes ont produits de meilleurs résultats à l'exercice de mémoire qu'un groupe témoin, sans modification. Toutefois, leurs cerveaux n'ont pas grossi. L'équipe scientifique se réjouit toutefois des résultats, jugés encourageants.

Le monde scientifique reste sceptique sur l'expérience chinoise car celle-ci n'apporterait rien de réellement nouveau à la science. Martin Styner, informaticien de l'université de Caroline du Nord et spécialiste en Imagerie par Résonance Magnétique a aidé à écrire le rapport chinois de l'expérience. Il reste dubitatif sur l'expérience en elle-même. Selon lui son rôle se cantonnait à former des étudiants scientifiques sur la récolte de données à partir d'images IRM.

"Il y a un tas d'aspects de cette étude que vous ne pourriez pas faire aux États-Unis", dit-il. "Elle a soulevé des questions sur le type de recherche et sur la qualité des soins apportés aux animaux".

Toutefois il n'est pas volontaire pour poursuivre ce type de recherche sur des singes transgéniques. « Nous avons créé cet animal qui est différent de ce qu'il est censé être. Lorsque nous faisons des expériences, nous devons avoir une bonne compréhension de ce que nous essayons d'apprendre, d'aider la société, et ce n'est pas le cas ici". Créer et entretenir des singes modifiés génétiquement s'avère cher. De plus il est difficile de confirmer qu'avec juste cinq singes transgéniques il existe une réelle différence dans le développement.

Dans un mail, Su répond qu'effectivement utiliser seulement 5 singes était une limite. Il souhaite à cet effet « fabriquer » davantage de singes et tester de nouveaux gènes humain. Pour exemple il a ajouté le gène SRGAP2C à des singes. Ce gène, surnommé « commutateur de l'humanité » ou également « chaînon manquant ». Celui-ci aurait de fortes chances de jouer un rôle dans l'apparition et le développement de l'intelligence humaine. Toutefois il est, selon Su, encore trop tôt pour dévoiler les résultats de l'expérience.

Et toi que penses-tu de ces trouvailles scientifiques? Est-ce que faire des tests sur des singes afin de faire progresser la science est envisageable selon toi? Est-ce qu'effectuer des observations sur des embryons humains serait plus éthique? N'hésite pas à nous le faire savoir en commentaire!